« Bonjour Thibaut,
Merci encore pour l’interview de ce matin. Je tenais juste à ajouter que bla bla rayonnement culturel bla bla bla bla notre rapide développement bla bla bla invités d’exception bla bla putes.
Par ailleurs, j’aimerais vous inviter, toi et Alexis (mon chef) à notre prochaine croisière sur l’East River.
A bientôt ! »
Bible de tout journaliste qui se respecte, la charte de Munich, aussi appelée Déclaration des devoirs et des droits du journaliste, dicte aux professionnels concernés de « s’interdire (…) de recevoir un quelconque avantage en raison de la publication ou de la suppression d’une information ».
Publication d’une information, croisière sur l’East River ou les deux ? Inévitablement, cet innocent courriel de remerciement m’embarqua dans un insoutenable conflit intérieur d’une bonne quinzaine de secondes.
Hé hé hé ! Une croisière sur l’East River !
Sur le Nil, sur l’East River ou en mer d’Iroise, c’est un avantage en raison de la publication d’une information.
Cette croisière coûte 50 $ normalement, ça ne se refuse pas.
Un cadeau à 50 $ ? On veut t’utiliser !
Et alors ? Et puis, et puis… Et puis c’est aussi une bonne raison de créer des liens avec des acteurs de l’information locale.
Pourquoi faire ? Il te reste qu’une pauvre semaine de stage !
Justement, ce serait con de pas profiter de mes derniers jours à New York.
La charte de Munich l’interdit.
Ouais mais j’ai rien signé, moi !
Un bon journaliste doit avoir conscience de ses responsabilités.
Je serai pas le premier. Ni le dernier.
Un journaliste total sait se démarquer de ses confrères.
« Le journalisme total, c’est totalement con ! » a dit le prophète Pétère.
Gné ?
Faut pas confondre connerie et déontologie.
Nan mais what the fuck ?!
La déontologie, c’est pour les faibles.
Je n’avalerai pas ça !
That’s what she said.
Et puis quoi, merde, une croisière gratos sur l’East River !
Ainsi, après un début bien difficile, le diablotin parvint avec brio et à grands coups d’arguments idiots à surprendre son moralisateur adversaire, renverser la situation et remporter cet intense débat.
Et grâce à lui, ce samedi soir là, j'embarquai avec mon chef, nos deux invitées (comprises dans la gratuité) et toute une grappe de vieux gens chics et nantis, sur ce petit yacht. Sa vue sur la skyline (comprise également), sa Statue de la Liberté (comprise toujours), son coucher de soleil (compris mais c’était un coup de bol) et son bar (non compris) (forcément).
Le Brooklyn Pont et Brooklyn derrière.
Le Brooklyn Pont et Manhattan derrière.
Dans le port d'Manhattan...
Drapeau en mal d'inspiration.
Compagnons touristes.
Merci sponsor.
The French Morning Dream Team (et Jo).
Eau mouillée qui brille.
MoveYourAss Team, en charge de l'animation.
Coucher de soleil de ouf malade (avec un petit avion, en haut à droite, si vous regardez bien).
Blue night.
Floue night.